Le plan québécois

Publié le par Hubert Mansion

Que filme la caméra québécoise?  Les «fuckés».  Qu’il s’agisse des Bouguons, de Minuit le soir, de Borderline, Au nom de la loi, Les Boys, La vraie histoire des Lavigueur, Les Invasions Barbares, Un homme et son péché et de tant d’autres, on ne voit que le déséquilibre humain sous toutes les coutures, surtout les cicatrices.

Si le plan américain consistait à camper l’être humain jusqu’à la taille, le plan québécois revient à le filmer à quatre pattes, à genoux ou à terre.  Épuisé, éjecté, réduit à la plus simple expression de sa souffrance, dans les ténèbres de L’Age des Ténèbres.

Décrire, montrer et filmer tant de souffrances témoigne-t-il de la douleur de ceux qui dirigent les caméras ou de leur clientélisme? Les deux peut-être. Mais il ne s’agit au fond, sous une forme à peine nouvelle, que du vieil inconscient collectif québécois qui ressurgit: l’apologie et la contemplation de l’état de victime.

Le cinéma québécois, en général, déteste les héros ou ne veut pas y croire. Il préfère les perdus, les déchus, les exclus, ceux qui n’ont aucune issue et il se sert de sa caméra comme d’un microscope plutôt que de jumelles.  Ce faisant, il donne à ses spectateurs le droit de descendre de plus en plus bas en eux-mêmes plutôt que l’envie de monter de plus en plus haut, d’examiner ses vices plutôt que d’aspirer à ses vertus.

Et en ce sens, la qualité que ne possède pas le cinéma québécois est terrible: il n’a pas d’humanisme. Il a remplacé l’amour par la pitié, comme certains bourgeois autrefois à la sortie de la messe.

 

Ref. image: scène du film "La petite Aurore" - 1952

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C
Cher M. Mansion,Je viens de découvrir votre entrevue à RC du 6 mars et votre blogue, par la même occasion. Je suis très heureuse d'entendre et de lire vos analyses très fines sur une culture qui vit dans la victimisation constante, par rapport à son histoire.Je n'ai rien contre les Québecois. Ce sont des êtres humains comme nous tous et comme nous tous, ils souffrent. Mais, il est temps de se réveiller et de changer les choses. Il faut accepter que le passé soit le passé. Il faut maintenant évoluer et aller de l'avant! Le deuil est terminé!Merci pour votre partage!
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A
tu as vraiment raison  et que  tu me sensibilises au fait que je ne trouvais pas de satisfaction à suivre ces programmes...<br /> <br />  <br /> <br /> Bonne journée,<br /> <br />  <br /> <br />       Alfreda
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P
Huberttu m'enlèves les mots de la bouche... je visionne ces jours-ci les films québécois en nomination aux Jutra pour voter en toute connaissance de cause... et c'est pas jojo. Ce soir, un homme aphasique, une femme en pleurs, un pavillon de banlieue, un couple qui ne se parle plus,... Hier, une femme qui attend son mari disparu, un vendeur d'assurance dans un motel le long de l'autoroute, un marchand de produits de seconde main, des pavillons de banlieue encore, de la pluie,... triste triste triste...
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